Durant tout le mois de février, l’Assemblée nationale examinera le projet de loi portant sur la réforme des retraites : 15 jours en commission des Affaires sociales et 15 jours en séance.
Membre de la Commission des Affaires sociales, je serai mobilisé à temps complet sur ce dossier.
La question des retraites intéresse et préoccupe l’ensemble des Français. C’est bien naturel.
C’est d’ailleurs cette intense préoccupation qui est à l’origine de la grande journée de mobilisation syndicale du jeudi 19 janvier. C’est une mobilisation qu’il faut entendre.
La réforme proposée par le gouvernement vise en effet à porter progressivement l’âge de départ à la retraite à 64 ans en 2030 à raison d’un trimestre par an. Le nombre d’annuités cotisés, quant à lui, ne change pas et reste à 43 ans. Ces annonces créent inévitablement de l’inquiétude voire du mécontentement.
Ceci étant dit, l’âge de départ à la retraite n’a cessé de reculer depuis de nombreuses années. Les gouvernements successifs, de droite comme de gauche, ont soit augmenté le nombre de trimestres à valider, soit repousser l’âge de départ à la retraite depuis plus de vingt ans.
Ainsi, l’âge moyen de départ à la retraite au régime général, selon la Caisse nationale d’assurance vieillesse est-il passé de 61,7 ans en 2006 à 63,5 ans en 2020.
Pourquoi alors, une nouvelle réforme ?
Notre système de retraites à la différence, de nombreux autres pays est un système où la solidarité entre les générations est au centre du dispositif. Pendant que les salariés actifs travaillent, une partie de leurs cotisations salariales sert à payer les pensions des personnes actuellement à la retraite.
C’est le principe même de la retraite par répartition et permet à tout le monde de bénéficier d’une retraite même les plus modestes.
C’est un système de solidarité et de justice que nous devons conserver car il est l’un des acquis social les plus précieux de l’après-guerre.
Le contraire du système par répartition c’est la retraite par capitalisation où chacun cotise pour soi, en fonction de ses revenus. C’est un système le plus répandu dans les pays industrialisés et j’y suis fermement opposé.
C’est pourquoi pour conserver et sécuriser notre système, il faut qu’il y ait suffisamment de salariés qui cotisent pour nos retraités.
Or, les chiffres sont parlants.
Si, en 1970, la France comptait 3 cotisants pour 1 retraité. En 2000, elle n’en comptait plus que 2 pour 1 retraités. Aujourd’hui, en 2023, nous en sommes à 1,7 cotisants pour 1 retraités et, si nous ne faisons rien, ce sera 1, 5 cotisants pour 1 retraité à horizon 2040.
Si rien n’est fait, notre système sera excessivement déficitaire et ce seront les générations futures qui devront en payer les conséquences avec peut-être pour conséquence une diminution des pensions de retraite versées !
J’estime que ne rien faire en l’état serait injuste pour nos enfants et petits-enfants et qu’il faut prendre dès maintenant les mesures adaptées pendant qu’il en est encore temps.
Je sais que beaucoup de Français sont courageux et travaillent beaucoup et que certains ont l’impression légitime que cette réforme est une nouvelle pénalité qu’ils doivent subir.
Certains diront aussi qu’il est injuste de reporter à 64 ans l’âge de départ mais il n’existe pourtant pas de véritables alternatives solides et pérennes.
En effet, si nous augmentions les impôts ou les cotisations – de surcroît dans un contexte bien réelle d’inflation et de hausse du coût de la vie – cela aurait un impact immédiat sur le pouvoir d’achat des Français et sur la santé de notre économie.
Cette réforme est donc un « mal nécessaire » si on veut sauver notre système de retraite par répartition sans fragiliser notre modèle économique et social.
Cette réforme comportera d’ailleurs des éléments de justice et de progrès. Ainsi, les 170.000 personnes partant à la retraite du fait d’une carrière longue continueront à être protégés. Ainsi, les personnes en situation d’invalidité ou d’inaptitude pourront toujours partir à 62 ans à taux plein et les travailleurs handicapés pourront partir dès 55 ans comme aujourd’hui. Ainsi les congés parentaux seront désormais pris en compte comme des trimestres travaillés. Ainsi le dispositif des départs anticipés des travailleurs exposés à l’amiante sera maintenu comme c’est le cas aujourd’hui, de même que le régime particulier des marins auquel nous ne toucherons pas. Ainsi, aussi, le système de retraite progressive sera-t-il étendu au secteur public.
Enfin tous les salariés qui ont travaillé au SMIC durant toute leur vie partiront avec une retraite de 1200 € et cette retraite minimale concernera aussi les 2 millions de retraités actuels qui touchent la pension la plus basse. Je pense notamment aux agriculteurs.
Les questions cruciales de la pénibilité, des carrières longues et des seniors doivent également avancer et faire l’objet d’une vraie révolution culturelle dans notre façon de les appréhender.
D’autres sujets doivent d’ailleurs, encore, être éclaircis et améliorés et c’est la discussion parlementaire qui permettra ces améliorations.
L’examen du projet de loi doit permettre de mettre sur la table toutes les pièces du dossier pour faire évoluer ce texte et permettre son acceptation et son adoption la plus large possible. Le temps est donc venu du débat parlementaire qui permettra, pendant deux mois, de s’exprimer sur un texte qui engage l’avenir de tous et de notre modèle social.