Le rapport de la commission d’enquête de l’affaire Lactalis a été remis ce jour, 18 juillet, au Président de l’Assemblée Nationale
Membre de la commission d’enquête parlementaire dans l’affaire Lactalis, j’ai eu le plaisir de participer à la quasi-totalité des 27 auditions organisées, regroupant au total 98 personnes. Je salue le président de la commission : M. Christian HUTIN, député Nouvelle Gauche du Nord ainsi que le rapporteur, M. Grégory BESSON-MOREAU, député LREM de l’Aube, pour la qualité de l’animation de cette commission.
Je veux d’abord souligner la réactivité du parlement dans ce dossier : l’affaire Lactalis a éclaté en décembre 2017 et, dès le 5 avril, la commission d’enquête s’installait pour sa première audition. Aujourd’hui, 18 juillet (soit un peu plus de 6 mois après la révélation de l’affaire, le rapport est déjà remis) et on peut penser que d’ici à la fin de l’année, une PPL (Proposition de Loi) sera déposée, soit 1 an seulement après les faits.
C’est bien là, aussi, le rôle du parlement, celui du contrôle et de l’investigation même si on peut regretter le manque de moyens et de temps dont dispose les parlementaires pour ces missions. C’est une des raisons d’ailleurs pour laquelle je plaide en faveur de la réforme constitutionnelle en cours qui prévoit moins de parlementaires mais plus de moyens effectifs.
L’ensemble des auditions où je suis intervenu est retranscrit sur le site de l’Assemblée Nationale, et l’ensemble des auditions de la commission d’enquête est accessible ici.
Je me félicite de la grande diversité de ces auditions mais également du fait que tous les représentants invités sont venus le plus souvent en personne. Les patrons de la grande distribution, des laboratoires publics ou privés, les ministres, les victimes, les administrations d’Etat, les associations de consommateurs, les syndicats agricoles… Nous avons pu auditionner tous ces acteurs, souvent lors d’échanges passionnants.Voir ici la liste des auditions .
Nous avons entendu M. Emmanuel BESNIER, président du groupe Lactalis, à l’issue d’un épisode mouvementé puisque ses avocats avaient saisi la garde des Sceaux en lui demandant l’interruption de nos travaux en raison de l’existence d’une procédure judiciaire en cours !
Le rapport d’enquête comprend 41 propositions que vous pouvez retrouver ici : Liste des propositions de la commission.
Parmi celles-ci, j’en citerai quelques-unes qui me semblent les plus pertinentes :
Proposition n° 31 :
Prévoir l’obligation pour les laboratoires de transmettre directement les autocontrôles positifs contextualisés aux autorités publiques. Pour renforcer la lisibilité et l’exploitabilité des données transmises, ces dernières pourraient être contenues dans un rapport statistique.
Proposition n° 39 :
Mettre en œuvre dans les meilleurs délais la redevance sur les industriels prévue par le règlement européen n° 2017/625. (=afin de financer les postes de contrôle).
Proposition n° 13 :
Doter l’ensemble des caisses des magasins d’un système de blocage au lot (=cela ne doit pas être compliqué aujourd’hui avec les technologies avancées).
Proposition n° 8 :
Rendre possible l’utilisation des données personnelles liées au paiement d’un produit en cas de crise sanitaire élevée et avérée – atteinte à la santé ou à la sécurité publique, incluant l’éventualité d’un attentat -. Afin de pouvoir avertir le détenteur de la carte bancaire du caractère dangereux du produit qu’il a acheté, il sera élaboré une procédure avec les autorités bancaires et le GIE « Carte bancaire » qui devra être totalement sécurisée et donner lieu à un suivi. Des sanctions devront être prévues en cas de non-application de cette procédure, dès lors qu’elle a été autorisée. (= l’important dans pareil cas est de pouvoir joindre les acheteurs dans les plus brefs délais).
L’intégralité des 41 propositions n’aboutira pas. Mais, elles vont maintenant être discutées. D’autres auditions, d’autres séances de travail auront lieu. Néanmoins, on peut penser que les principales, les plus emblématiques, seront reprises dans des proposions de loi ou bien dans des dispositions du futur projet de loi de finances.
En conclusion, je retiens de cette première participation à une commission d’enquête parlementaire que celle-ci n’est pas un tribunal, nous ne sommes pas là pour juger mais bien pour comprendre les raisons qui ont pu entraîner cette « affaire Lactalis », qui -heureusement- n’a pas fait de victimes mais dont les conséquences auraient pu être extrêmement graves.
L’enjeu était double : d’abord, améliorer la protection des consommateurs, ensuite préserver l’image et la qualité sanitaire des produits agro-alimentaires français.
18 juillet 2018