Débat en Commission des affaires sociales
Mercredi 6 novembre, j’ai présenté devant les membres de la Commission des affaires sociales mon rapport sur la mission « travail et emploi » du projet de loi de finances pour 2025 (PLF 2025). La ministre du Travail et de l’Emploi Astrid Panoysan-Bouvet nous a fait l’honneur de participer à cette réunion.
Cette présentation est l’aboutissement des travaux menés depuis septembre, étayés par les auditions réalisées à l’Assemblée et mes rencontres sur le terrain.
> Pour en savoir plus : mission travail-emploi du PLF 2025 : mes travaux préparatoires
Quelle analyse des crédits budgétaires ?
Le contexte
Le cadre dans lequel ce budget a été élaboré se caractérise tout d’abord par des contraintes budgétaires particulièrement importantes. Face à l’état dégradé de nos finances publiques, l’Etat demande en effet 60 milliard d’euros d’économies (pour en savoir plus : le marathon budgétaire débute).
Le budget « travail et emploi » – qui s’élève à 21,5 milliard d’euros – est mis à contribution, avec une baisse globale de 1,48 milliard par rapport à 2024. La ministre a souhaité remettre en perspective ces chiffres par rapport au budget global : les crédits de la mission « travail-emploi » représente 4 % du budget de l’Etat en 2025, contre 3 % en 2015.
Autre facteur à prendre en compte, le taux de chômage. Il demeure particulièrement bas, même si un ralentissement économique commence à se faire sentir.
=> Au vu de ces éléments de contexte – et tout en soulignant que la maîtrise de nos dépenses publiques ne doit pas se faire au détriment de politiques de l’emploi ambitieuses- , il me semble que notre action doit être prioritairement ciblée vers les personnes les plus éloignées de l’emploi.
Priorité sur les personnes les plus éloignées de l’emploi
Le PLF 2025 traduit bien cette volonté, en confortant les subventions destinées aux acteurs impliqués dans la remobilisation et l’accompagnement des plus fragiles.
Sanctuarisation des fonds
La subvention de 1,35 milliard d’euros allouée en 2024 à France Travail est reconduite à l’identique, afin que l’opérateur puisse poursuivre le déploiement de ses nouvelles missions de gouvernance et de pilotage prévues par la loi du 18 décembre 2023 sur le plein emploi.
Les misions locales et l’insertion par l’activité économique, en première ligne dans l’accompagnement des personnes les plus éloignées du marché du travail, voient également une prolongation quasi à l’identique des crédits qui leur sont dévolus (respectivement 600 millions d’euros et 1,52 milliard d’euros).
Autre point de satisfaction : les fonds publics destinés à l’AFPA s’élèvent à 115 millions d’euros, soit une augmentation de 5 millions d’euros alors que ce montant n’avait pas varié depuis 2018.
Un effort demandé à France Travail sur les effectifs
C’est une mesure qui a fait débat au sein de la Commission. Le budget prévoit une participation de France Travail à l’effort collectif au niveau de son effectif, en abaissant de 500 le nombre d’équivalents temps plein annuel travaillé (ETPT) en 2025. Cela correspond à un peu moins d’1 % de la masse salariale actuelle de France Travail, qui s’élève à 55 000. Cet effort, loin d’être neutre, me paraît néanmoins cohérent avec la trajectoire fixée en 2027 par l’opérateur lui-même. Par ailleurs, il fait suite à une augmentation significative – plus de 10 % – entre 2019 et 2024. France Travail me semble être en capacité d’absorber cette baisse.
Rationalisation des aides à l’apprentissage
L’apprentissage connaît une réelle montée en puissance. Grâce aux différentes mesures initiées depuis 2017, l’objectif d’un million d’apprentis a été atteint en octobre 2023.
En l’état actuel de la règlementation, les employeurs d’un apprenti touchent une aide à l’embauche de 6000 euros, quels que soient la taille de l’entreprise et le niveau de l’apprenti.
Si le principe de cette aide financière est bien entériné en 2025, les crédits affectés diminuent significativement, passant à 651 millions d’euros.
Il n’est pas illégitime, dans le contexte budgétaire que nous connaissons, de diminuer les aides. Mais attention à ne pas enrayer cette belle dynamique.
Plusieurs options sont sur la table : baisse linéaire, modulation selon la taille de l’entreprise ou le niveau de qualification. Le nouveau calibrage sera défini par voie règlementaire. Je regrette que cette décision n’ait pas encore été prise alors qu’elle sera applicable au 1er janvier 2025. Comme me l’ont confié les différentes entreprises et acteurs de la formation que j’ai rencontrés – récemment l’AFPA et la Fédération Française du Bâtiment -, ce manque de lisibilité crée un climat d’incertitude.
En réponse aux différentes interpellations, la Ministre a affirmé que cette rationalisation des aides ne remettait pas en cause la « révolution culturelle » engagée sur l’apprentissage, qui demeure une « priorité politique ». Elle conduit actuellement des concertations et s’est engagée à trancher rapidement.
Le contrat d’engagement jeune : un bilan positif et encourageant
En complément de l’examen des crédits, j’ai souhaité évaluer de façon plus approfondie le Contrat d’engagement jeune (CEJ). C’est le principal dispositif existant pour accompagner les jeunes les plus éloignés de l’emploi. Mis en oeuvre depuis le 1er mars 2022 par les missions locales et France Travail, il s’est substitué à l’ancienne garantie jeunes.
Ce dispositif se caractérise par un accompagnement intensif et personnalisé, avec un suivi hebdomadaire par un conseiller référent unique et la réalisation d’activités à raison de 15 à 20 heures par semaine.
Après deux ans et demi, quel premier bilan peut-on dresser ?
- Le CEJ a rencontré son public puisqu’entre mars 2022 et septembre 2024, près de 800 000 jeunes ont signé un CEJ.
- Le taux d’accès à l’emploi est encourageant : au 6ème mois suivant leur sortie du dispositif, 55 % des personnes entrées en CEJ entre mars 2022 et juin 2023 sont en emploi.
- En outre, ce dispositif a contribué à redonner du sens au métier de conseiller à France Travail et au sein des missions locales.
Le rapport propose, en plus, des pistes pour améliorer et conforter le CEJ. Il s’agit notamment de renforcer les coopérations entre les différents acteurs et de mobiliser davantage les entreprises locales, pour offrir plus d’activités aux jeunes.
=> Au vu de cette analyse, je me félicite de la consolidation du dispositif dans le PLF 2025 (786 millions d’euros).
La ministre a également apporté un satisfecit sur le CEJ. Au-delà, elle a appelé à une évaluation plus systématique des dispositifs d’accompagnement et d’insertion, par souci d’efficacité mais aussi d’efficience de la dépense publique.
Lien vers le compte-rendu des débats en Commission :
Ma présentation en vidéo :
Un budget amendé et voté
La Commission des affaires sociales a adopté le rapport, avec quatre amendements :
- Un amendement du groupe Modem visant à revenir sur les baisse des effectifs de France Travail ;
- Trois amendements que j’ai portés pour renforcer encore plus l’accompagnement des personnes les plus précaires. Ils augmentent les enveloppes budgétaires destinées aux parcours contractualisés d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie (PACEA), aux entreprises adaptées ainsi qu’aux groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification (GEIQ).
Pour consulter le rapport, cliquez sur l’image ci-dessous :
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=> [actualisation au 12 novembre 2024] En raison du rejet de la partie « recettes » du PLF 2025 lors du vote solennelle mardi 12 novembre, cette mission – qui figure dans le volet « crédits » n’a pas été débattue en séance publique. C’est le PLF 2025 dans sa version initiale qui a directement été transmis au Sénat.
– Rédigé le 8 novembre 2024 – Mis à jour le 12 novembre 2024 –