Le procès de Joël Le Scouarnec, ancien chirurgien condamné en mai 2025 pour des faits d’une gravité exceptionnelle, marque un tournant dans la lutte contre la pédocriminalité. Au-delà du verdict, cette affaire met en lumière des failles systémiques dans notre système judiciaire, médical et institutionnel, et interroge sur les réformes nécessaires pour mieux protéger les victimes. C’est en ce sens que des auditions sont conduites ces derniers mois à l’Assemblée nationale.
Un parcours judiciaire hors norme
Entre 1989 et 2014, Joël Le Scouarnec a commis des viols aggravés et agressions sexuelles sur près de 300 victimes, en majorité mineures.
Déjà condamné en 2005 pour détention d’images pédopornographiques, il avait pourtant continué à exercer la médecine.
En décembre 2020, une première condamnation est intervenue pour des faits visant quatre victimes. L’instruction, nourrie par la découverte de journaux intimes, a ensuite permis d’identifier des centaines de victimes supplémentaires.
En septembre 2024, le renvoi devant la cour criminelle départementale du Morbihan a été décidé.
Le 28 mai 2025, l’ex-chirurgien a été condamné à 20 ans de réclusion criminelle, assortis d’une période de sûreté et d’un suivi socio-judiciaire de 15 ans. Il n’a pas fait appel. Les 13 et 14 novembre prochains, les victimes seront de retour devant la justice pour une audience consacrée à leur indemnisation.
Des failles révélées par l’affaire
L’affaire souligne plusieurs difficultés majeures :
- La prescription, qui a conduit à écarter certaines plaintes, laissant des victimes sans reconnaissance judiciaire.
- Le choix de la cour criminelle plutôt que d’une cour d’assises, critiqué par certains pour une affaire d’une telle ampleur.
- De graves défaillances dans le contrôle médical et le signalement : absence d’interdiction d’exercer après la condamnation de 2005, manque d’alerte dans les hôpitaux, réaction tardive des autorités ordinales.
- Le ressenti d’injustice des victimes, en raison de sanctions jugées insuffisantes et du traitement parfois inégal de leurs préjudices.
Plusieurs évolutions sont envisagées pour tirer les leçons de ce drame : Adapter la prescription pour mieux tenir compte du temps nécessaire aux victimes de violences sexuelles pour se manifester ; rendre systématique la transmission des condamnations pénales aux ordres professionnels, avec retrait automatique du droit d’exercer pour des crimes sexuels ; renforcer les signalements obligatoires dans les établissements de santé et le rôle disciplinaire de l’Ordre des médecins ; créer des dispositifs judiciaires adaptés aux affaires « hors norme » de pédocriminalité ; mieux accompagner les victimes, avec un suivi psychologique durable et la mise en place d’un observatoire indépendant des violences sexuelles sur mineurs.
Audition du 1er juillet 2025 à l’Assemblée du Collectif de victimes de Joël Le Scouarnec
Ce mardi 1er juillet, la commission des affaires sociales auditionnait, conjointement avec la commission des lois, des représentants du Collectif de victimes de Joël Le Scouarnec : Manon Lemoine, Alexandra Moricet et Gabriel Trouvé, membres, et Me Marie Grimaud, avocate du Collectif. Le collectif souhaite présenter des propositions pour qu’une telle affaire ne puisse pas se reproduire. C’est Manon Lemoine, porte-parole du collectif de victimes de Joël le Scouarnec, qui répond à mes deux questions.
Mon intervention
Simplifier et harmoniser les procédures disciplinaires des médecins : ma question en audition
Lors de l’audition du 30 septembre 2025, j’ai souhaité attirer l’attention sur la complexité des procédures disciplinaires qui concernent les médecins. En effet, depuis la loi HPST de 2009, un progrès avait été réalisé en élargissant la liste des autorités habilitées à saisir les chambres disciplinaires de première instance pour les praticiens hospitaliers, notamment en y intégrant le Conseil national et les conseils départementaux de l’Ordre des médecins. Pourtant, cette évolution n’a pas suffi à mettre fin à la dualité de procédures qui persiste entre médecins libéraux et médecins hospitaliers, une situation difficile à gérer et souvent mal comprise par les usagers. J’ai donc posé la question suivante : le Conseil national de l’Ordre des médecins souhaite-t-il de nouvelles évolutions législatives afin de simplifier et d’harmoniser ces procédures ?
– 1er juillet 2025 –
Mise à jour le 30 septembre 2025