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Mercosur : je vote contre

Non au Mercosur

Ce 26 novembre, la séance publique traitera à l’Assemblée nationale du Mercosur.

Le groupe EPR (auquel j’appartiens) votera contre la ratification de l’accord.

> Notre tribune du 12 novembre 2024 Non au Mercosur

 

Débat à l’Assemblée nationale

Conformément à l’article 50-1 de la Constitution, devant l’une ou l’autre des assemblées, le Gouvernement peut, de sa propre initiative ou à la demande d’un groupe parlementaire, faire, sur un sujet déterminé, une déclaration qui donne lieu à débat et peut, s’il le décide, faire l’objet d’un vote sans engager sa responsabilité. Le débat qui va se tenir ce mardi 26 novembre doit permettre de faire un point d’étape sur les discussions entre l’Union européenne et le Mercosur.

 

Accord d’association entre l’Union européenne et le Mercosur : déclaration du Gouvernement

 

Rappels historiques

  • Le Mercosur (Marché commun du sud), qui représente près de 65 % du PIB d’Amérique latine et 220 millions d’habitants, est en discussion depuis plus de vingt ans avec l’Union européenne afin de conclure un accord de libre-échange.
  • Après des discussions initiées en 2000 puis plusieurs fois retardées, un accord de principe a été conclu en 2019. La validation définitive de l’accord pourrait intervenir dans les prochaines semaines.
  • Les piliers « dialogue politique et coopération » de l’accord ne soulèvent pas de difficultés particulières. En revanche, son volet « commerce » suscite des inquiétudes quant à ses conséquences économiques, sociales, sanitaires et environnementales.

 

Le groupe EPR votera contre !

Pour le groupe EPR, ce débat sera l’occasion de rappeler les enjeux de cet accord, et les conditions que nous fixons pour sa ratification.

 

En l’état actuel, l’accord ne présente pas les conditions nécessaires pour obtenir le soutien de notre groupe.

Le groupe EPR votera contre la ratification de l’accord.

 

Les raisons de notre vote

  • Les réserves du groupe EPR et du président de la République à cet accord, sont avant tout liées à l’absence de garanties environnementales. Les accords de Paris sur le climat sont centraux, et ils doivent être intégrés comme des éléments essentiels à l’accord UE-Mercosur. Si l’accord n’est pas aligné sur notre politique climatique, il doit tomber.
  • Les autres points de désaccords concernent : l’introduction de produits agricoles à des coûts très compétitifs, l’absence de garanties pour la protection des droits des populations autochtones, des conditions de travail inégales entre les deux espaces géographiques et politiques.
  • Le Gouvernement demande notamment la négociation de mesures miroirs, en parallèle de l’accord. Les méthodes de production interdites chez nous, comme les antibiotiques de croissance, les OGM, les hormones, et qui ne sont pas forcément détectables dans les produits, doivent être interdites dans les importations.

 

Le Mercosur : un géant dans le commerce international

Le Mercosur (Marché commun du sud) réunit quatre États d’Amérique latine :

  • le Brésil,
  • l’Argentine,
  • l’Uruguay
  • le Paraguay.

Deux autres pays lui sont associés : le Chili et la Bolivie.

Avec ses membres associés, le Mercosur représente près de 82% du PIB d’Amérique latine et plus de 300 millions d’habitants. Il est considéré comme le quatrième bloc économique mondial.

L’Union européenne est le 1er partenaire commercial du Mercosur, son 1er fournisseur et son 1er client, ainsi que son 1er investisseur, devant les États-Unis. En 2021, le commerce birégional a même dépassé les niveaux d’avant la pandémie (+4,7% par rapport à 2019).

 

Un projet d’accord de libre-échange entre les deux régions est évoqué depuis 1995 et la signature d’un accord-cadre interrégional de coopération entre les deux entités. Cet accord de libre-échange serait le plus important conclu par l’UE du fait de la population concernée et des volumes d’échanges couverts (40 à 45 milliards d’euros d’importations et d’exportations annuels).

 

 

L’accord, de quoi parle-t-on ?

  • L’accord couvrirait un marché de 780 millions de personnes (UE + Mercosur).
  • Les échanges actuels entre l’UE et le Mercosur s’élèvent à 88 milliards d’euros par an pour les biens, et à 34 milliards d’euros pour les services.
  • L’UE exporte chaque année des biens vers le Mercosur pour une valeur totale de 45 milliards d’euros et importe l’équivalent de 43 milliards d’euros.
  • L’accord autoriserait l’importation annuelle à droits réduits de 99 000 tonnes de bœuf du Mercosur, représentant environ 1,2 % de la consommation totale de bœuf de l’UE.
  • Il permettrait également l’importation annuelle à droits réduits de 180 000 tonnes de viande de volaille du Mercosur, soit environ 1,4 % de la consommation totale de volaille de l’UE.
  • Le Mercosur disposerait de deux contingents tarifaires pour un total de 650 000 tonnes d’éthanol, représentant environ 15 % de la production de l’UE.

Au total, selon une analyse d’impact commandée par la Commission européenne, l’accord pourrait générer une croissance supplémentaire de 0,1 % dans l’UE et de 0,3 % dans le Mercosur d’ici 2032.

 

Bien que les niveaux présentés soient faibles, les agriculteurs européens soulignent le risque d’importer des produits ne respectant pas les règles sanitaires de l’UE. En effet, l’UE interdit sur son sol les hormones de croissance depuis 1998 et en théorie l’importation de viande de bœufs et de volailles élevées avec ces produits. Mais faute de traçabilité et de contrôle suffisant, Bruxelles ne peut garantir que la viande importée respecte ces obligations. De plus, pour les antibiotiques de croissance, dont l’usage est interdit dans l’UE depuis 2006, aucune réciprocité ne d’applique à date.

En 2020, un rapport de Stefan Ambec souligne que les éventuels gains économiques de l’accord ne peuvent pas compenser les coûts environnementaux. Il alerte sur le risque d’accroître les émissions de gaz à effet de serre et la déforestation en cas de hausse des exportations sud-américaines de viande bovine, ainsi que sur les risques sanitaires.

 

États des lieux des négociations

Les négociations ont peiné à aboutir : débutées en 2000, suspendues en 2004, reprises en 2013, elles ont ralenti à nouveau, jusqu’en 2019 avec la conclusion d’un accord de principe. Mais la ratification de cet accord demeure incomplète, notamment du fait de l’opposition de la France, de l’Autriche ou encore des Pays-Bas.

Cet attentisme est dû aux critiques qui entourent le projet, notamment sur ses conséquences potentiellement néfastes pour l’environnement et en termes de déforestation. C’est ce motif qu’avait mis en avant la France pour refuser son approbation depuis 2019. Le projet d’accord est par ailleurs vivement critiqué par les agriculteurs européens qui s’inquiètent d’une concurrence déloyale en raison de normes environnementales, sociales ou sanitaires moins exigeantes en Amérique latine.

 

Contreparties environnementales

En mars 2023, la Commission européenne a présenté aux pays du Mercosur une proposition d’acte additionnel à l’accord de 2019 visant à ce que les deux parties s’engagent à respecter les mesures contenues dans l’Accord de Paris8 ainsi que « toute autre décision » prise par l’ONU sur ce texte, à mettre en œuvre le Cadre mondial de la biodiversité de 2023, et à ratifier des conventions fondamentales de l’OIT. La proposition européenne ne prévoit cependant pas de sanctions pour faire respecter ces engagements.

La question se pose également de savoir si le règlement sur les produits issus de la déforestation et le règlement établissant un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, adoptés par le Parlement européen en avril 2023, s’imposeront à l’accord.

 

Position Française sur cet accord

La France a rappelé qu’elle ne soutiendrait l’accord qu’à certaines conditions, à savoir :

  • la mention de la mise en œuvre effective de l’Accord de Paris sur le climat ;
  • le respect des normes environnementales et sanitaires et l’inscription explicite du principe de précaution dans l’accord (principe de réciprocité) ;
  • la protection des secteurs qui risquent de pâtir de l’accord, notamment certaines filières agricoles et alimentaires (clause de sauvegarde).

En janvier 2024, face à la colère du monde agricole, Gabriel Attal s’est prononcé en faveur de l’intégration de la réciprocité des normes et la mise en place de clauses miroirs : « elles doivent protéger les consommateurs et garantir à nos producteurs qu’ils luttent à armes égales avec leurs concurrents étrangers ».

Le président de la République Emmanuel Macron a renouvelé également ses réserves, soutenant l’introduction de clauses miroirs. « La règle qui vaut à l’intérieur pour la production doit valoir à l’extérieur quand on facilite les importations ».

Le 12 novembre 2024, 622 parlementaires français ont lancé un appel à Ursula von der Leyen pour ne pas signer cet accord qui selon eux « Les conditions pour l’adoption d’un accord avec le Mercosur ne sont pas réunies ».

Tribune : Non au Mercosur

Même sans le soutien de la France, la Commission européenne a cependant affirmé sa volonté de poursuivre les négociations. Le nombre de pays opposés se réduit. L’Allemagne souhaite désormais que les négociations aboutissent, notamment pour son volet industriel et son importance géostratégique. La France continue d’agir pour trouver une minorité de blocage et ainsi empêché l’adoption de l’accord.

Le sommet du G20, qui s’est réuni les 18 et 19 novembre à Rio avec les représentants de l’Union européenne et ceux du Brésil et de l’Argentine, était perçu comme une fenêtre d’opportunité pour signer l’accord. Or, le blocage de la France a permis de gagner du temps.

Aujourd’hui, la Commission européenne s’estime proche d’un compromis acceptable. Sa présidente, Ursula von der Leyen, aimerait profiter d’une des prochaines échéances diplomatiques importantes (comme le sommet du Mercosur, prévu en Uruguay les 5 et 6 décembre) pour annoncer la conclusion d’un accord définitif.

Contenu, non-exhaustif, de l’accord annoncé en juin 2019

La suppression, à terme, des droits de douane sur 91% de biens exportés par les entreprises de l’UE vers le Mercosur.

Les pays du Mercosur supprimeraient des droits élevés sur des produits industriels, tels que :

  • les voitures (taxées à l’heure actuelle à 35 %),
  • les pièces de voiture (taxées de 14 à 18 %),
  • les machines (taxées de 14 à 20 %),
  • les produits chimiques (taxés jusqu’à 18 %),
  • les vêtements (taxés jusqu’à 35 %),
  • les produits pharmaceutiques (taxés jusqu’à 14 %),
  • les chaussures en cuir (taxées jusqu’à 35 %),
  • les textiles (taxés jusqu’à 35 %).

 

L’élimination progressive des droits de douane sur les exportations de denrées alimentaires et de boissons de l’UE, telles que :

  • le vin (taxé à l’heure actuelle à 27 %),
  • le chocolat (taxé à 20 %),
  • le whisky et d’autres alcools (taxés de 20 à 35 %),
  • les biscuits (taxés de 16 à 18 %),
  • les pêches en conserve (taxées à 55 %),
  • les boissons non alcoolisées (taxées de 20 à 35 %).

 

La suppression des droits à l’importation sur 92 % des biens du Mercosur exportés vers l’UE.

 

Rappel du processus européen de négociation de l’accord

L’accord UE-Mercosur, négocié par la Commission européenne au nom de l’Union européenne, est qualifié d’accord d’association. Ce type d’accord est soumis à une procédure spécifique, régie principalement par l’article 218 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE).

Conformément à cette procédure, le Conseil de l’UE joue un rôle central. Il est chargé d’autoriser la négociation, de signer et de conclure l’accord.

Toutefois, avant sa conclusion définitive, l’accord doit obtenir l’approbation du Parlement européen. Dans le cas des accords d’association, les décisions du Conseil nécessitent une unanimité des États membres.

Une exception est prévue par l’article 207 du TFUE pour les accords purement commerciaux, qui peuvent être adoptés par une majorité qualifiée au sein du Conseil. Cependant, l’accord UE-Mercosur, qui inclut à la fois des volets politiques et commerciaux, ne relève pas de cette exception et nécessite donc l’unanimité.

Au niveau national, notamment en France, l’article 53 de la Constitution impose une ratification par le Parlement français pour tout accord relevant de compétences partagées entre l’UE et les États membres. L’accord UE-Mercosur, en tant qu’accord d’association, entre dans cette catégorie et devra donc être soumis à un vote des parlementaires français pour produire des effets juridiques.

En résumé, l’entrée en vigueur de l’accord UE-Mercosur repose sur un processus complexe. Il requiert une adoption à l’unanimité par le Conseil de l’UE, l’approbation du Parlement européen, ainsi que la ratification des Parlements nationaux, dont celui de la France.

 

– 26 novembre 2024 –

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