« La loi NOTRe, quoi que nous en pensions les uns et les autres, a été l’aboutissement d’un processus de près de dix ans ».
Le 12 octobre 2017, je suis intervenu en séance publique à l’Assemblée dans le cadre de l’examen de la proposition de loi sur l’eau et l’assainissement. Provenant du Sénat, ce texte a donné lieu à de longs débats, car il était proposé de rendre optionnel le transfert des compétences eau et assainissement aux EPCI (compétence rendue obligatoire, rappelons-le, par la loi Notre, au 1er janvier 2020). Motif invoqué par cette proposition de loi ? « Conforter la commune comme cellule de base de la démocratie locale »…
A mon sens, on invoque là une conception plutôt étroite, voire assez étriquée, de la commune et de ses compétences pour justifier cette proposition de loi. Les rédacteurs ont cru bon d’ajouter ensuite : « il s’agit de passer outre les difficultés que rencontrent les collectivités et les établissements publics dans la mise en œuvre de ce transfert de compétences ». Or cela ne correspond pas vraiment, là non plus, à la réalité rencontrée sur le terrain. Car, au fond, de quoi s’agit-il ? Il s’agit purement et simplement de tirer un trait sur ce qui a été adopté, non sans peine et sans débats, avec la loi NOTRe, votée en 2015. Est-ce cela que demandent les élus communaux ?
Non ! La loi NOTRe, quoi que nous en pensions les uns et les autres, a été l’aboutissement d’un processus de près de dix ans, au cours desquels diverses réformes territoriales ont été menées à leur terme ou ont avorté.
Durant toutes ces années, les élus des collectivités locales, à commencer par ceux des plus petites collectivités, n’ont cessé de demander à l’exécutif et au législatif de créer avant tout de la stabilité dans l’organisation des compétences entre les collectivités, et d’éviter qu’une majorité défasse sans cesse ce qu’avait fait une autre majorité, quand ce n’était pas la même. Or, avec cette proposition de loi, le risque aurait été de recréer du désordre et de l’instabilité, là où, petit à petit, les choses se sont apaisées. Car, quoi qu’on puisse en penser, les choses se mettent en place. La loi NOTRe a effectivement attribué aux EPCI les compétences en matière d’eau et d’assainissement et a fixé un délai raisonnable, jusqu’en 2020, pour que ce transfert ait lieu dans les meilleures conditions.
Et la vérité, c’est que, depuis 2015, les communes regroupées en EPCI se sont organisées. La vérité, c’est qu’elles ont déterminé, dans leurs agendas, le moment où elles organiseraient leur mutualisation en matière de gestion de l’eau et d’assainissement, ainsi que la manière de le faire.
La réalité, c’est que de nombreux EPCI ont déjà intégré cette compétence ou ont programmé cette intégration pour 2018, 2019 ou 2020. Chaque transfert est, c’est vrai, un cas singulier, qui doit tenir compte de problématiques locales de tout ordre. Mais faire aujourd’hui marche arrière après plusieurs années de débats et alors que des négociations sont en cours ne serait pas, selon moi, un signal positif.
Cela va créer des désordres et la plus grande confusion, alors que cette question exige avant tout de la clarté.
Par ailleurs, sur le fond, ce texte ne répond pas de manière pertinente aux enjeux locaux sur ces sujets. Avec ce texte, je le vois bien, on essaie d’opposer les élus communaux aux élus des EPCI. Or, comme nous l’avons rappelé, ce sont les mêmes élus !
J’ai été maire jusqu’à juillet dernier, maire pendant seize ans d’une commune littorale de 2 000 habitants dans le Finistère.
J’ai donc eu, moi aussi, à traiter ces sujets de près. Les communes littorales, c’est une particularité, doivent faire face à des mesures draconiennes en ce qui concerne la qualité des eaux de baignade. Je rappelle, au passage, que la pollution des eaux de baignade n’est pas nécessairement le fait des agriculteurs, pourtant souvent mis en cause : elle est souvent la conséquence d’assainissements individuels ou collectifs défectueux. Neuf fois sur dix, la pollution vient d’un assainissement situé non pas sur le territoire de la commune, mais sur celui d’une ou plusieurs communes proches ou éloignées. Cela montre bien qu’il est aujourd’hui nécessaire de mettre en commun cette responsabilité.
Enfin, ce texte entend se justifier par la nécessité d’éviter une augmentation excessive du prix de l’eau. Or, dans la plupart des cas, c’est l’inverse qui se produit, ainsi que le montrent de très nombreux exemples !