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Essais nucléaires : les recommandations de la Commission d’enquête

Après un travail collectif de six mois, la Commission d’enquête sur les conséquences des essais nucléaires réalisées en Polynésie française vient de publier ses préconisations.

Près de 60 ans après les premiers essais nucléaires en Polynésie, ce rapport répond à l’exigence impérieuse de faire connaître l’histoire de ces essais, d’en montrer et d’en décrire tous les aspects, des plus généraux aux plus techniques, ainsi que l’ensemble de leurs conséquences.

Ils visent également à mettre en lumière la contribution du peuple polynésien à l’édification de notre défense nationale.

 

=> Dans cet article, vous trouverez une synthèse des recommandations de la Commission d’enquête (le rapport est accessible dans son intégralité via les liens suivants : Tome 1Tome 2)

 

Vous pouvez également visionner mon interview ainsi que celui de la rapporteure dans la vidéo ci-dessous réalisée par l’Assemblée Nationale :

 

 

Des travaux studieux dans un esprit de sérénité

Créée le 16 janvier 2025 à l’initiative du groupe Gauche Démocrate et Républicain (GDR), la Commission d’enquête parlementaire a pour objet de faire toute la lumière sur les conséquences des 193 essais nucléaires, réalisés entre 1966 et 1996 en Polynésie française, sous l’égide du Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP). J’ai présidé les travaux de cette instance et c’est ma collègue députée de Polynésie française, Mereana Reid Arbelot, qui a été désignée rapporteure.

C’est effectivement un sujet qui me touche particulièrement : j’ai été sensibilisé sur ce sujet par des vétérans, nombreux dans le Finistère, et avec qui j’ai des contacts réguliers.

Si ces essais ont sans conteste joué un rôle déterminant dans la stratégie de dissuasion nucléaire de la France, garantissant ainsi sa souveraineté et son indépendance, ils n’ont pas été sans conséquence au niveau sanitaire et environnementale.

Il faut arrêter le mythe des essais propres. Il est temps d’apporter toute la transparence sur ce sujet.

Dans ce cadre, la Commission a organisé 48 auditions et échangé avec 123 personnes aux profils très divers : journalistes, historiens,  scientifiques, associations de victimes, vétérans, représentants des institutions. Plusieurs ministres ont également été reçus.

=> La liste détaillée des personnes auditionnées ainsi que les vidéos /comptes rendus sont à retrouver sur cette page : le détail des travaux de la Commission d’enquête

 

La Commission a également effectué des déplacements. Une délégation de parlementaires s’est rendue fin mars en Polynésie française, afin de recueillir des témoignages et des données sur site.

> Pour en savoir plus : le déplacement de la Commission d’enquête en Polynésie française

Un déplacement sur le site de la direction des applications militaires du Commissariat à l’Energie Atomique à Bruyères-le-Châtel a également été organisé.

 

 

Nos recommandations

Les recommandations de la rapporteure Mereana Reid Arbelot s’articulent autour de 4 axes :

 

Les conséquences socio-économiques

Ne pas pouvoir revenir en arrière suppose d’aller de l’avant

Suite à l’installation du Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP) en Polynésie française, toute l’économie locale s’est structurée autour de cette activité. L’île a ainsi connu un « boom économique », s’accompagnant d’une augmentation du niveau de vie de la population locale. Mais la fin des activités du CEP révèle la vulnérabilité de ce modèle. Comme le souligne le rapport, « après trente ans de rente nucléaire, la Polynésie française est obligée de repenser et de construire son développement économique indépendamment du fait nucléaire » (extrait du rapport).

Encore aujourd’hui, la Polynésie doit relever l’enjeu de diversifier ses sources d’activité.

 

Les conséquences sanitaires

Sortir des postures, apaiser les angoisses, résoudre les problèmes

C’est le point central du rapport.

Il souligne en effet la difficile appréhension des conséquences sanitaires ; la culture du secret a largement sous-évalué les risques radiologiques et leur impact, aussi bien avant que pendant et après les activités du CEP.  Il met également en avant le manque de suivi scientifique rigoureux, impartial et transparent.

Plusieurs lacunes sont pointées du doigt par la Commission d’enquête, qu’il s’agisse :

  • de l’information auprès de la population, des militaires et du personnel exerçant au CEP,
  • des mesures de surveillance et d’évacuation,
  • ou encore des dispositifs de radioprotection mis en place.

 

La Commission propose d’engager des travaux de recherches approfondis sur les conséquences sanitaires de ces essais.

Nous soutenons, par ailleurs, un renforcement de l’accompagnement des victimes. La loi « Morin » du 5 janvier 2010 marque une première avancée, en instaurant un cadre juridique pour indemniser les victimes. Riche des 15 années de recul, la Commission porte quatre pistes d’améliorations :

Réviser les conditions de prise en charge. La Commission propose ainsi de supprimer l’exigence relative au seuil d’exposition (1 millisievert), qui ne permet pas de déterminer le lien – ou l’absence de lien –  entre les maladies radio induites et les essais nucléaires. Nous demandons à ce que la décision d’indemnisation soit fondée sur des critères cumulatifs de temps, de lieu et de pathologie, permettant de déterminer une présomption d’exposition et ainsi un risque avéré.

Etendre la liste des pathologies reconnues, actuellement au nombre de 23.

Faciliter l’accès à l’indemnisation en faveur des ayants droit et des victimes par ricochet.

Renforcer le rôle de la Commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires (CCSCEN).

Les conséquences environnementales

Elles appellent une gestion partagée et utile pour la Polynésie française

La biodiversité polynésienne a été sérieusement affectée par ces essais nucléaires, tant atmosphériques que souterrains. Sur ce volet, le suivi des conséquences apparaît plus transparent. Cependant, il s’avère fragmenté et insatisfaisant, en raison de la multiplication des acteurs et du manque de coordination entre la Polynésie et l’Hexagone.

Nous estimons ainsi indispensable de centraliser l’ensemble des données liées au suivi des conséquences environnementales ainsi que d’en améliorer la diffusion.

La gestion mémorielle du passé pour construire l’avenir

Le démantèlement du CEP a engendré un héritage patrimonial conséquent, qui a amené la Commission à s’interroger sur la façon dont il peut être géré. Nous formulons dans ce cadre plusieurs préconisations, en particulier pour faciliter l’accès aux archives.

Il nous semble également essentiel que tous les français puissent connaître cette histoire : sans la Polynésie française, et sans les polynésiens, la France ne disposerait pas d’une arme atomique lui permettant de se faire entendre des plus grandes puissances mondiales.

Un défi majeur est de lever la défiance qui s’est emparée des polynésiens durant ces dernières décennies à l’égard de la métropole, celle-ci ne devant pas se muer en rancoeur voire se transformer en colère.

D’où l’importance de nos travaux, pour faire toute la lumière sur cette histoire mais aussi pour que la France engage une demande de pardon à l’égard de la Polynésie, au vu des conditions dans lesquelles s’est déroulée cette campagne d’essais ainsi que de ses conséquences.

 

J’appelle de tous mes vœux la mise en œuvre des principales recommandations. 

 

> Dans la presse :

Commission d’enquête sur les essais : “Indemniser” et “réconcilier les Polynésiens avec eux-mêmes” © Tahiti Infos

Polynésie : la commission d’enquête sur les essais nucléaires demande le pardon de la France © Le Monde

Commission d’enquête sur les essais nucléaires : « La France doit demander pardon », une demande historique qui résonne dans tout le fenua © Tahitipresse.pf

« Si, il y a eu des mensonges » : ce qu’il faut retenir du rapport de la commission d’enquête parlementaire des essais nucléaires en Polynésie © 1 Outre-mer

Rapport sur les essais nucléaires en Polynésie : « Attention à ce que cette rancœur ne se transforme pas en colère », prévient le président de la commission d’enquête © France Info

Essais nucléaires en Polynésie : « Il faut arrêter le mythe des essais propres » © Le Télégramme

 

-18 juin 2025 –

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2 commentaires sur “Essais nucléaires : les recommandations de la Commission d’enquête”
  1. Un grand merci, on avance ! Il faut continuer et reconnaître officiellement qu’ils y a pu avoir des manquements, des mensonges, la France en sortirai grandi.
    Je suis directement concerné , je me bats depuis 2020 , mon dossier est en cours d’instruction en cour d’ appel formulé par le Civen ,je pensais qu’après deux décisions favorables du tribunal administratif de Rennes l’ affaire était clos ..
    Non le Civen continu moralement et physiquement à nous considéré comme des menteurs.
    J’espère être toujours en vie et connaître la décision qui sera prise.
    Merci Monsieur le député pour votre engagement sans faille et votre écoute auprès des vétérans des essais nucléaires.

    1. Bonjour Monsieur Lebrun,
      Le député Didier Le Gac a bien pris connaissance de votre témoignage.
      Il vous remercie vivement pour votre message de soutien et vous souhaite bon courage dans vos démarches judiciaires.
      Bien à vous,
      La permanence parlementaire

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