Accompagnement des malades et fin de vie : examen du projet de loi
Le projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 10 avril 2024. Il est composé de deux titres, le premier portant sur les soins d’accompagnement et les droits des malades et le second sur l’aide à mourir (dossier législatif du projet de loi).
Consulter le dossier législatif du projet de loi
Une commission spéciale a été constituée pour examiner le projet de loi. Elle est composée de commissaires de chaque commission permanente. On ainsi on y retrouve des commissaires des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République .
Consulter la page dédiée à la Commission spéciale pour l’examen du projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie
La commission spéciale est présidée par Agnès Firmin Le Bodo, Olivier Falorni (désignée rapporteur général) et Laurence Cristol, Caroline Fiat, Laurence Maillart-Méhaignerie et Didier Martin (désignés rapporteurs thématiques).
Quel est le calendrier ?
La commission spéciale a débuté ses travaux le 22 avril (suivre les auditions sur le portail vidéo).
Après avoir auditionné les acteurs concernés et spécialistes (professionnels de santé, fédérations hospitalières, acteurs du domicile, professeurs, représentants des cultes, associations…), elle examinera le projet de loi à partir du lundi 13 mai (suivre les auditions de la commission).
Du 13 au 17 mai, la commission spéciale examinera le texte.
Le texte sera débattu en séance publique par les députés à partir du 27 mai, avant d’être transmis au Sénat
A consulter :
Projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie
Réunion publique le 6 mai à 20 à Saint-Renan
A cette occasion j’organise une réunion publique sur la circonscription, à Saint-Renan, le lundi 6 mai prochain, de 20h à 22h30, à l’Espace Culturel l’Amphi.
Cette réunion est ouverte à tous, sans inscription préalable : Invitation à la réunion publique
Intervenants :
- Chantal Bouloux, Députée et membre de la Commission spéciale
- Dr Gaëtan Piton Germes, Président de la Coordination Bretonne des soins palliatifs
- Andrée Guillamet, Déléguée de l’ Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité
- Gauthier Moal, Mutuelle MGEN
Une demande sociétale
Ce projet de loi, annoncé par le chef de l’État, répond à une demande sociétale. Il a été précédé d’un avis du Comité consultatif national d’éthique qui s’est dit favorable en 2022 à une « aide active à mourir » strictement encadrée, à condition que soient parallèlement renforcés les soins palliatifs.
Répondre à toutes les situations
Durant ces vingt dernières années, le législateur est intervenu à plusieurs reprises pour affirmer la prise en considération de l’autonomie et du choix du patient en fin de vie et consacrer le principe du respect de sa dignité. Si l’ensemble de ces évolutions a d’ores et déjà considérablement modifié l’approche de la fin de la vie, elles ne répondent pas à toutes les situations tel que l’ont précisé le Comité consultatif national d’éthique (télécharger l’Avis 139) ainsi que l’Académie nationale de médecine (télécharger l’Avis de 27 juin 2023).
Respect de l’autonomie de la personne
Ces constats ainsi que les revendications sociétales, renouvelées par les membres de la Convention nationale sur la fin de vie (télécharger le rapport de la Convention Citoyenne sur la fin de vie avril 2023) appellent une réponse qui implique de concilier :
- D’une part, notre devoir de solidarité envers les personnes les plus fragiles parce que gravement malades, en prenant des mesures fortes en faveur des soins palliatifs et d’accompagnement ;
- D’autre part, le respect de l’autonomie de la personne en ouvrant la possibilité d’accéder à une aide à mourir, afin de traiter les situations de souffrance intenable que rencontrent certaines personnes dont le pronostic vital est engagé de manière irrémédiable en raison d’une maladie grave et incurable.
Un projet de loi : deux volets
Premier volet : Soins d’accompagnement et directives anticipées
Le projet de loi rénove l’approche de la prise en charge de la douleur et de la fin de vie, en intégrant la notion de soins palliatifs définie par le code de la santé publique, dans celle plus englobante de « soins d’accompagnement ». Ces soins couvrent d’autres soins que les soins palliatifs (prise en charge nutritionnelle, accompagnement psychologique, musicothérapie, massage…) et plus globalement toutes les mesures mis en œuvre pour répondre aux besoins des malades et de leurs proches aidants.
Une nouvelle catégorie d’établissement médico-social, dénommée « maison d’accompagnement », est créée. Il s’agira de structures intermédiaires entre le domicile et l’hôpital qui accueilleront et accompagneront les personnes en fin de vie et leur entourage. Celles-ci pourront y être admises lorsque le retour à domicile, à la suite d’une hospitalisation, n’est pas possible, ou encore lorsque la prise en charge à domicile ou en établissement médico-social ne s’avère pas adaptée, afin d’éviter une hospitalisation. Ces maisons seront financées par l’Assurance maladie et par un forfait journalier à la charge des personnes accueillies.
Les patients, dans le cadre de l’annonce d’une maladie grave, pourront systématiquement bénéficier d’un temps d’échange sur l’anticipation, la coordination et le suivi de leur prise en charge globale et d’un plan personnalisé d’accompagnement.
Les conditions dans lesquelles les directives anticipées peuvent être formulées sont améliorées. Les bénéficiaires d’un plan personnalisé d’accompagnement pourront l’annexer à leurs directives anticipées. Toute personne pourra, en outre, enregistrer ses directives anticipées dans l’espace numérique de santé et accorder un accès à un proche aidant.
Second volet : L’aide à mourir
Le second volet du projet de loi concerne l’aide à mourir. Elle consistera à autoriser et à accompagner la mise à disposition à une personne qui le demande d’une substance létale, pour qu’elle se l’administre elle-même ou, si elle n’en est pas capable, se la fasse administrer par un médecin, un infirmier, un proche ou une personne volontaire de son choix.
Les personnes qui pourront demander cette aide devront être :
- majeures ;
- françaises ou résidents étrangers réguliers et stables en France ;
- aptes à manifester leur volonté de façon libre et éclairée ;
- atteintes d’une maladie grave et incurable avec un pronostic vital engagé à court ou à moyen terme ;
- victimes de souffrances réfractaires (qu’on ne peut pas soulager) ou insupportables.
Les personnes devront être capables de prendre leur décision en ayant conscience de la portée et des conséquences de leur choix, ce qui exclut les personnes souffrant d’une maladie psychiatrique qui altère leur discernement au moment de la démarche. Quant à la notion de court terme ou moyen terme, l’exposé des motifs du gouvernement précise que selon la Haute autorité de santé, « On parle de pronostic vital engagé à court terme lorsque le décès du patient est attendu dans quelques heures à quelques jours ». Le moyen terme se compte, quant à lui, en semaine ou mois.
Le projet de loi définit ensuite l’ensemble de la procédure de l’aide à mourir (demande, examen, décisions du médecin, délais, renoncement) et les droits de la personne (date de la mort, droit de mourir accompagné et hors de son domicile). L’aide à mourir sera prise en charge par l’Assurance maladie.
Une clause de conscience est instituée pour les professionnels de santé qui refuseraient de participer à la procédure d’aide à mourir. Ils devront renvoyer la personne vers un confrère.
Les professionnels qui seraient volontaires pour participer à l’aide à mourir pourront se déclarer auprès d’une nouvelle commission, qui centralisera leurs coordonnées. Cette nouvelle commission, placée auprès du ministre chargé de la santé, sera également chargée du contrôle et de l’évaluation du dispositif d’accompagnement à l’aide à mourir.
Point d’équilibre entre soins d’accompagnement et aide à mourir
Ce projet de loi s’inscrit ainsi dans le sillage des évolutions législatives engagées depuis 2002 et présente une réponse éthique aux besoins d’accompagnement des malades dans un continuum de prise en charge de la douleur et, dans de rares cas, de souffrances inapaisables.
Fondé sur les deux titres « soins d’accompagnements et « aide à mourir », le texte dessine un cadre permettant un point d’équilibre entre le renforcement de l’accompagnement des patients et de leur entourage et l’ouverture d’une aide à mourir pour des personnes majeures atteintes de maladies graves et incurables induisant des souffrances insoutenables et réfractaires aux thérapeutiques. Les conditions strictes d’accès à l’aide à mourir ainsi que la procédure et le contrôle prévus sont protectrices des personnes concernées et des professionnels de santé.
Fidèle à sa vocation humaniste, la France renforce ainsi la prise en considération du principe d’autonomie tout en veillant à protéger les personnes, c’est-à-dire à assurer le non-abandon et l’accompagnement des plus vulnérables, expression emblématique « de notre solidarité et de notre fraternité », tel que souhaité par le président de la République.
Stratégie décennale des soins d’accompagnement
La ministre a également présenté lors du Conseil des ministres la stratégie décennale des soins d’accompagnement, pour le renforcement des soins palliatifs, de la prise en charge de la douleur et de l’accompagnement de la fin de vie.
Consulter le rapport Stratégie décennale soins palliatifs
Cette stratégie décennale porte l’ambition de bâtir un modèle français des soins d’accompagnement, alors que la France n’est aujourd’hui pas pleinement au rendez-vous de l’enjeu d’accès universel aux soins palliatifs.
Le passage du concept des soins palliatifs aux soins d’accompagnement marque la volonté du Gouvernement d’anticiper la prise en charge des patients dès le diagnostic de la maladie, de l’élargir à tous les besoins médicaux et non médicaux, ainsi qu’à l’accompagnement de l’entourage.
Dans ce sens, la stratégie porte trois évolutions majeures pour notre système de santé et notre société :
- Favoriser une prise en charge anticipée des malades chroniques ;
- Renforcer l’accompagnement des patients, au-delà des aspects médicaux, par l’ouverture à d’autres dimensions (sociale, psychologique, spirituelle, attention à l’entourage) et le plus proche possible de leur domicile ;
- Soutenir, avec le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, l’émergence d’une filière de formation universitaire en médecine palliative, ce qui est indispensable pour engager l’effort décisif de formation qu’il est nécessaire de déployer rapidement.
Un modèle français des soins d’accompagnement
Ces trois évolutions intégrées à la stratégie décennale de développement des soins d’accompagnement permettent de dégager un modèle français des soins d’accompagnement, prenant en compte les spécificités de notre pays.
Un investissement décisif pour la dépense publique de soins palliatifs
Pour cela, un investissement décisif débutera dès l’année 2024 à hauteur de 1,1 milliard d’euros de mesures nouvelles, soit une hausse de 66 % des moyens alloués aux soins d’accompagnement sur la période 2024-2034, pour répondre à une hausse de 16 % des besoins.
Ainsi la dépense publique de soins palliatifs, de 1,6 milliard d’euros en 2023, passera à 2,7 milliards d’euros en 2034, avec une forte impulsion sur ces trois prochaines années.
La stratégie décennale sera articulée autour de 4 axes et 30 mesures dont 14 sont issues du rapport d’expertise élaboré sous l’égide du professeur Franck Chauvin, repris dans sa quasi-intégralité.
Ces mesures permettront d’amorcer puis de renforcer l’évolution nécessaire de la prise en charge de ces patients pour soutenir et accompagner la prise en charge thérapeutique puis la fin de vie.
Concrètement ?
Cette stratégie portera des progrès très concrets, pour les patients, pour les professionnels de santé et pour leurs proches :
- Chaque patient devra se voir proposer dès le diagnostic de la maladie grave un plan personnalisé d’accompagnement pour une prise en charge sur-mesure ;
- Une attention forte sera portée à la prise en charge des enfants avec la création de 17 unités de soins palliatifs pédiatriques, soit une par région.
- Tous les départements verront leur offre de soins palliatifs renforcée avec la création d’unités pour la prise en charge complexe dans les 20 départements qui en sont dépourvus, le renforcement de l’hospitalisation à domicile (HAD), et la création de 100 nouvelles équipes mobiles territoriales ;
- Des maisons d’accompagnement seront créées ;
- Une attention particulière sera portée sur le renforcement de l’accompagnement par les bénévoles et le développement des collectifs d’entraide visant à encourager l’engagement de nos concitoyens ;
- 100 postes de chefs de clinique (dont 10 dès début 2024) et 100 postes d’universitaires titulaires seront créés et sera mis en place un diplôme d’études spécialisées en médecine palliative et soins d’accompagnement.
Mourir dignement : « La loi doit être votée au plus vite » © Le Télégramme
– 10 avril 2024 –