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Réforme des retraites : Le point sur le régime des avocats

A l’écoute des avocats résidents ou exerçant sur la circonscription, j’ai eu l’occasion d’échanger avec certains membres de la profession quant à leurs inquiétudes sur la situation de leur régime autonome dans le cadre du projet de loi de réforme des retraites.

Ainsi, j’ai interrogé le gouvernement par une Question Écrite adressée au Haut-Commissaire aux retraites sur les conséquences de la transformation du régime de retraite des avocats. La réponse vient d’être publiée au Journal Officiel.

Question N°24811

  • Question publiée au JO le : 26/11/2019 page : 10249
  • Réponse publiée au JO le : 10/03/2020 page : 1976

Texte de la question

Didier Le Gac attire l’attention de M. le haut-commissaire, auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites, sur les conséquences de la transformation du régime de retraite des avocats. Si la réforme des régimes spéciaux et des régimes autonomes de retraite est attendue et nécessaire pour atteindre une solidarité qui doit être universelle et non plus catégorielle, les hypothèses retenues au sujet du régime des avocats appellent néanmoins certaines précisions. Ainsi, indépendamment de la forte opposition à la nationalisation de leur régime de retraites, c’est la situation des plus modestes d’entre eux qu’il convient d’intégrer dans les arbitrages qui seront opérés dans le projet de loi.

Il apparaît que de très grandes diversités de revenus existent dans une profession aujourd’hui elle-même très diversifiée et qui n’échappe pas à la précarité.

Issue du rapport sur la réforme des retraites la préconisation du passage de 14 % à 28 % de taux de cotisation, dont 28,12 % au départ, puis 12,94 % pour 1 à 3 PASS et 2,81 % au-delà, constitue une réelle préoccupation pour les avocats non-salariés en cabinets individuels, soit 66 % de la profession.

Ainsi, un avocat dont le revenu annuel net est de 31 000 euros verrait ses cotisations s’élever à 11 107 euros avec un taux de 28,12 % contre 4 521 euros aujourd’hui, soit une augmentation de 246 %. Lorsque l’on sait que le revenu médian de l’avocat est de 43 000 euros, l’impact de cette augmentation sur la rentabilité des petits cabinets individuels est bien réel, au risque d’en voir disparaître certains.

Or, ces mêmes avocats, souvent les plus jeunes, sont majoritairement ceux qui acceptent les dossiers financés à l’aide juridictionnelle pour défendre les plus modestes des justiciables. C’est la raison pour laquelle, il souhaite savoir quelles mesures d’ajustement le Gouvernement entend proposer dans le cadre de la réforme des retraites afin de tenir compte de la réalité de la profession d’avocat, et en particulier de préserver l’activité des plus modestes d’entre eux.

 

Texte de la réponse

La Caisse nationale des barreaux français (CNBF) a été créée en 1948 en tant que section professionnelle de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales et est devenue autonome en 1954. Elle gère le régime d’assurance vieillesse de base en annuités, le régime d’assurance vieillesse complémentaire en points et le régime invalidité-décès des avocats dès leur inscription au barreau qu’ils exercent une activité non salariée ou salariée.

Les régimes de base et complémentaires de la CNBF sont aujourd’hui excédentaires, mais cela est dû à la situation démographique actuelle de la profession d’avocat et non au mode de gestion de la caisse. En effet, d’après la CNBF, celle-ci compte aujourd’hui 5,1 cotisants pour 1 retraité (droits directs), alors qu’au régime général cette proportion est deux fois plus faible. Ce ratio démographique permet à la CNBF de servir des prestations d’un bon niveau, alors que les taux de cotisation sont parmi les plus faibles des travailleurs indépendants. Toutefois, le rapport démographique des affiliés de la CNBF est amené à décroitre au cours des décennies à venir : déjà sur une pente fortement décroissante (en 2006, 8,9 cotisants pour 1 retraité de droit direct ; en 2015 6 cotisants pour 1 retraité de droit direct), celui devrait atteindre 2,7 cotisants pour 1 retraité en 2040 de droit direct et 1,2 cotisant pour 1 retraité en 2060 de droit direct, d’après les projections de la CNBF. Avec la décroissance de la ration démographique, les excédents des régimes gérés par la CNBF diminueront aussi : d’après les projections de la CNBF, le régime de base serait en déficit en 2043 et ne serait plus en mesure d’honorer le paiement de l’ensemble des prestations en 2057, du fait de l’épuisement des réserves cette année-là. Un jeune avocat qui prête serment aujourd’hui et qui envisage de prendre sa retraite au cours des années 2060 est donc assuré de ne pas pouvoir obtenir des prestations du régime de base aussi généreuses que celles servies aux avocats honoraires aujourd’hui. Pour le régime complémentaire des avocats, la situation est similaire, même si les échéances sont plus lointaines : le régime sera déficitaire à partir de 2059 et ne sera plus en mesure d’honorer l’ensemble de ses engagements en 2086, d’après les projections de la CNBF.

Cet horizon plus lointain est le fait des efforts demandés aux jeunes générations d’avocats, pour lesquelles la CNBF a prévu d’augmenter les cotisations et de baisser leur rendement, à horizon 2029. A cette date, un euro cotisé rapportera environ 25 % de droits en moins qu’aujourd’hui.

Le régime de retraite de base des avocats participe au mécanisme de la compensation démographique, qui conduit les régimes bénéficiant d’une bonne santé démographique à financer une partie des déficits des régimes souffrant d’une situation démographique dégradée. C’est à ce titre que le régime de base des avocats a versé 96 M€ en 2019, principalement au régime de base des agriculteurs, qui compte plus de retraités que de cotisants.

Ce mécanisme, qui est un mécanisme démographique et non un effort de solidarité, est commun à l’ensemble des régimes de retraite de base et n’est donc pas spécifique au régime des avocats.

Le Gouvernement a eu de nombreux échanges avec les représentants des avocats au sujet de la réforme des retraites.  Le Gouvernement a pris des engagements clairs sur 3 aspects : le montant des cotisations, le niveau des pensions et le maintien de la CNBF.

S’agissant des cotisations, il n’y aura aucun effort de charge imposé par la réforme des retraites jusqu’en 2029.

Grâce au changement d’assiette sociale (avec un abattement de 30 %), l’impact du système universel sera d’un maximum de 5,4 points de hausse de cotisation pour les avocats d’ici 2040. Afin d’éviter ces hausses de cotisations pour les avocats les plus vulnérables, le Gouvernement a proposé plusieurs dispositifs possibles : le maintien d’un mécanisme de solidarité interne à la profession (amendement n° 42467 déposé par le Gouvernement) ou l’utilisation d’une partie des réserves de la CNBF.

Ce dispositif de solidarité pourra prendre en charge toute a hausse de cotisation pour les avocats dont le revenu est inférieur à 80 000€.

S’agissant du niveau des pensions, les projections effectuées et transmises aux représentants des avocats confirment que les avocats percevront une pension supérieure à celles du système actuel de la CNBF :  – de 13 % pour un avocat qui perçoit un revenu de 32 000 euros – de 24 % pour un avocat qui perçoit un revenu de 40 000 euros – de 11 % pour un avocat qui perçoit un revenu de 80 000 euros. Enfin, le Gouvernement s’est engagé à ce que les avocats conservent une caisse qui restera l’interlocuteur unique de la profession.

La CNBF pourra gérer l’ensemble des dossiers de retraites de l’ensemble des avocats. Elle continuera de gérer l’ensemble des réserves financières qui resteront toujours sous le contrôle de la profession. Les réserves de la CNBF resteront donc à la disposition de la profession et ne seront pas absorbées par le régime universel.

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