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Unanimité pour ma proposition de loi contre le dumping social dans le transmanche

Ce mardi 28 mars à 22h30 ma proposition de loi sur la lutte contre le dumping social dans le transmanche a été adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale, à la suite de son examen en séance commencé lundi.

 

Après son adoption en Commission des Affaires Sociales, mercredi 22 mars, le texte a été débattu en séance dans l’hémicycle. A cette occasion, et en tant que rapporteur du texte, j’ai eu l’honneur de prononcer un discours devant les parlementaires et membres du gouvernement présents (Vous trouverez ci-dessous la vidéo de ce discours ainsi que le texte de mon intervention).

Ensuite, après plusieurs heures de débats et d’examen des propositions d’amendements, les parlementaires se sont prononcés mardi en soirée, à l’unanimité, en faveur du texte.

Presque 1 an jour pour jour après le licenciement brutal de près de 800 marins anglais par l’armateur P&O, qui avait choqué l’ensemble des opérateurs du transport maritime de passagers, je me félicite que l’Assemblée nationale ait ainsi adopté à l’unanimité, ma proposition de loi. Je salue également l’esprit transpartisan qui a prévalu durant les travaux en commission et les débats dans l’hémicycle. Je remercie l’ensemble des organisations syndicales et professionnelles qui ont soutenu cette démarche et travaillé avec moi sur cette proposition de loi.

Ce texte destiné à lutter contre le dumping social des marins sur les navires à passagers opérants dans les liaisons transmanche, apporte ainsi 2 dispositifs essentiels :

  • un salaire minimum obligatoire, pour tous les marins, quelque soit le pavillon du navire ;
  • le respect d’un temps de repos à terre équivalent au temps d’embarquement.

Ces dispositions sont complétées par des mesures de contrôle et de sanctions en cas d’infraction.

C’est une belle première étape et un message fort envoyé par la France à l’ensemble du monde maritime. Il conviendra à présent de renforcer ce message auprès des autres états européens : le Secrétaire d’Etat à la mer, Hervé Berville, très mobilisé sur le sujet, s’est d’ailleurs engagé à le porter auprès de l’Union Européenne. Je salue également le fait que le ministre ait annoncé la signature prochaine d’un décret excluant le recours au RIF sur les liaisons transmanche.

Enfin, je rappelle aussi – et quel symbole- que le parlement britannique a voté cette semaine une loi quasiment identique, portant également sur le salaire minimum.

L’appel de Saint-Malo lancé en novembre 2022 par Jean-Marc Roué, président de la Brittany Ferries, aura donc été entendu car, au-delà de cette loi sur le dumping, c’est bien l’avenir de la marine marchande française qui est en jeu. Je resterai vigilant sur l’application effective de son texte et la mise en œuvre des moyens affectés aux objectifs de la loi.

=> L’ensemble du dossier relatif à cette proposition de loi est accessible ICI.

 

La vidéo de mon intervention dans l’hémicycle le 27 mars :

 

Discours du 27 mars 2023 :

Merci Madame la Présidente, Monsieur le Ministre, Madame la Présidente, Chers Collègues,

Je voudrais d’abord vous dire combien je suis heureux que nous soyons là aujourd’hui pour légiférer sur un sujet maritime aussi sensible et combien je mesure pleinement la responsabilité qui est la nôtre d’adopter un texte contre le dumping social dans la marine marchande. C’est un texte attendu !

Ce matin encore, j’ai reçu un message d’un habitant de ma circonscription : un commandant qui travaille depuis 20 ans sur les Ferries Douvres/Calais de la compagnie DFDS. Il se souvient du licenciement, il y a un an, de ces collègues marins de P&O et du traumatisme que cela a représenté dans toute la communauté maritime. Il voit au quotidien la situation se dégrader du fait du dumping social et il craint beaucoup pour l’avenir de la marine marchande.

Il termine son message par des encouragements amicaux que je ne peux que partager avec vous : « Votre loi montre que le gouvernement, en même temps que nos amis britanniques, agit dans le bon sens, c’est un vrai message positif ; J’espère que votre projet aboutira et que vous pourrez rallier de nombreux autres pays européens. »

Je souhaite aujourd’hui que nous soyons collectivement à la hauteur des attentes de ces marins ! Au-delà de nos divergences, nous le leur devons. Venons-en maintenant à la genèse de ce texte.

Il y a un an – comme je le rappelais – le 17 mars 2022, la compagnie P&O, acteur historique des liaisons maritimes transmanche, licenciait ses 786 marins sans aucun préavis. Quelques jours plus tard, cette même compagnie, via une société prestataire de main d’œuvre, réembauchait des marins, souvent extérieurs à l’UE, avec des conditions de travail dégradées et un salaire minimum équivalant à la moitié du salaire minimum britannique.

Ces méthodes brutales ont choqué les opinions publiques de part et d’autre de la Manche. Cet événement n’a fait que dévoiler un peu plus la mise à l’œuvre progressive du dumping social sur les liaisons maritimes.

Ce dumping social vise à tirer toujours davantage vers le bas les salaires et les conditions de travail des marins. Il menace très directement notre marine marchande nationale et la viabilité de notre système, protecteur des marins et des passagers.

Car c’est bien la sécurité des navires, de ses marins et de leurs passagers qui est ainsi mise en danger. Rappelons que la Manche, du rail d’Ouessant à Calais, est l’une des zones où le trafic maritime est l’un des plus dense au monde.

La Manche c’est un camion qui la traverse par bateau toutes les 5 secondes, un navire qui entre ou sort toutes les trois minutes et 91 000 personnes qui la traversent quotidiennement.

Ce sont aussi des cargos, porte-conteneurs, pétroliers, chimiquiers, qui empruntent ses voies montantes et descendantes, coupées par le trafic intense des ferries, les sorties des flottes de pêche et la navigation de plaisance. C’est dire l’importance cruciale de la sécurité sur cette zone, véritable carrefour maritime.

Et, comment, en effet, garantir cette sécurité des liaisons si nos marins ne bénéficient pas de suffisamment de temps de repos ? Or, aujourd’hui pourtant, P&O dont les navires battent pavillon chypriote depuis le Brexit, comme Irish Ferries, ne veulent entendre parler d’aucune harmonisation des règles sociales.

Face à ces méthodes, les armateurs français ont eu raison de tirer la sonnette d’alarme. J’étais avec eux à Saint-Malo le 5 novembre 2022 quand ils ont lancé leur appel en direction des pouvoirs publics. « On ne peut pas continuer dans cette spirale », dénonçait ainsi Jean-Marc Roué, président du conseil de surveillance de Brittany Ferries, compagnie créée par des agriculteurs bretons il y a tout juste 50 ans, et 1er employeur de marins français. Les organisations syndicales de cette compagnie se sont également demandé comment leur entreprise pourrait résister à une concurrence aussi brutale que déloyale ? Lors des Assises de la Mer de Lille le 8 novembre 2022, en réponse, vous annonciez alors, Monsieur le Ministre : « Je n’accepterai jamais de voir de telles pratiques se développer. » et vous vous engagiez à mettre la pression sur les armateurs et à sanctionner les ferries ne respectant pas les dispositifs sociaux de l’État d’accueil.

C’est à ce moment-là que nous avons commencé à échanger pour savoir comment rédiger et porter un texte de loi efficace devant la représentation nationale.

Ce texte, que j’ai l’honneur aujourd’hui de rapporter, vient donc inscrire dans la loi cette volonté que la juste rémunération des marins est bien aux fondements de notre modèle social et constitue un principe dont le respect est jugé crucial pour la sauvegarde de nos intérêts publics.

Lors de son examen en commission, en plus du salaire minimum, nous avons adopté un amendement que je défendais, comme beaucoup de mes collègues ici, visant à imposer la parité entre le temps d’embarquement et le temps de repos.

La difficulté de légiférer sur ce sujet tient au fait que le dumping social s’inscrit dans un phénomène mondial régit par des textes issus de conventions comme l’OMI, l’OIT et de nombreux textes de l’Union Européenne.

Rappelons ainsi que le libre pavillonnement permet à des armateurs d’immatriculer leurs navires dans des États appliquant des normes minimales en matière de droit du travail maritime. Ce contournement des règles permet à ces armateurs de réaliser des économies de plus de 35 % sur leur prix final par rapport à leurs concurrents français. Une situation qui n’est pas tenable pour l’économie du secteur.

C’est la raison pour laquelle nous avons fait le choix de proposer une loi de police pour légiférer de la manière la plus efficace sur ce sujet. En effet, une loi de police s’impose lorsque le respect d’une disposition impérative est jugé crucial par un pays pour la sauvegarde de ses intérêts publics. Cette loi de police, se conforme à la fois à un critère de proportionnalité de la mesure mais aussi à un critère concernant le lien entre l’application de la mesure et le territoire national.

C’est pourquoi, j’ai souhaité que cette loi, aussi ambitieuse qu’efficace, puisse se mettre en place rapidement sans être remise en cause à peine entrée en vigueur. Ce qui serait catastrophique pour les acteurs de notre filière. Je sais que pour certains juristes ce texte pourrait être considéré comme allant potentiellement au-delà de ce que nous pouvons faire. Je sais également que pour certains de mes collègues ce texte pourrait être considéré, politiquement, comme se situant en-deçà de ce que nous pourrions faire. Je répondrai juste qu’avec ce texte, j’essaye de tenir les deux bouts de la chaîne et que j’entends que cette loi ne soit pas bavarde mais sure juridiquement, pérenne et applicable.

C’est un texte que nous avons enrichi en Commission. Aujourd’hui, nous allons l’améliorer en demandant, par exemple, un durcissement proportionné des sanctions à l’égard des contrevenants.

Nous souhaitons aussi que le Gouvernement nous explique comment il entend renforcer les inspections et les moyens dédiées à celles-ci.

Sur la question méditerranéenne qui a animé certains échanges comme sur la question du pavillon des navires, c’est à dire leur nationalité et donc le droit qui s’applique, beaucoup d’entre nous souhaiteraient inscrire dans le marbre de la loi l’interdiction de recourir au RIF (Registre International Français) pour les navires à passagers. Je laisserai au gouvernement le soin de s’exprimer sur ces sujets pour nous dire quel est, selon lui, le véhicule le plus efficace pour s’assurer que nos navires restent sous pavillon français 1er registre.

Enfin, il faut se féliciter, que les britanniques eux-mêmes aient décidé de légiférer sur ce sujet et que, la semaine dernière, le parlement britannique ait voté en 1ère délibération une loi instaurant également un salaire minimum.

Je conclurai en disant que notre proposition de loi est une chance unique pour sauver notre marine marchande. Le compte à rebours est enclenché et il faut faire vite, très vite !

C’est pourquoi, aujourd’hui, tous ensembles, nous devons prendre nos responsabilités et agir !

Au-delà de notre pays, c’est aussi un appel à l’union européenne que nous lançons aujourd’hui afin qu’elle prenne ses responsabilités et propose une législation aussi ambitieuse que celle que nous portons aujourd’hui pour nos marins. C’est enfin encore, un signe de profond soutien à nos armateurs et à nos marins que j’adresse aujourd’hui afin qu’ils puissent continuer d’exercer dignement leur métier.

Je vous remercie.

 

=> Voir aussi mon Communiqué de Presse à la suite de ce vote, ICI.

– 29 mars 2023 –
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